mercredi 3 octobre 2018

SUMBALLEIN, de Adeline Miermont Giustinati. NOTES DE LECTURE XIV

Dès la citation initiale   (Je n'écris pas des livres, j'écris des forêts, Saint Augustin) nous savons que nous avons entre nos mains un livre organique. On plonge dans une recherche des origines -de l'univers, des sentiments, des paroles- et, en même temps, on navigue dans un mouvement de va-et-vient entre l'infime et le cosmique.
On cherche aussi un point de vue, une fissure pour apercevoir la réalité du monde . Il existe, d'ailleurs, un fragile équilibre ou, en réalité, une instabilité permanente de ce positionnement

la fissure ne se dit pas (...) 
elle est début de l'exode

qui naît surtout de la mise en valuer de la question des mots, qui ont été avalés, aspirés, pulvérisés depuis (ou pendant) la création de l'Univers.
Il s'agira donc d'une quête de la naissance des premiers sons qui ont commencé à vouloir définir le monde et à circonscrire l'Histoire, tout en étant conscient de l'impossibilité de la tâche

depuis la cavité préhistorique
j'entends les premières notes du soliste

Quel refuge trouver alors dans le chaos? Le corps? Sans doute, mais il ne s'agit pas réellement de trouver une protection dans un quelconque anthropocentrisme, mais plutôt dans un "viscère-centrisme"

je construis mon premier alphabet
 celui du corps
des fonctions vitales

qui dans son introspection va jusqu'à sa propre "soupe moléculaire" pour continuer à être aspiré par une force centripète vers un "temps zéro", vers la Pangée, comme s'il agissait de la seule zone tangible dans tout ce qui a existé, et dont il faudra puiser son énergie.
On peut donc se reposer sur l'autre? La réponse est plutôt en soi ("je suis le code et le chaos"), en sa propre dualité, dans sa capacité d'être une "porte vers l'infini" tout en ayant conscience que nous ne faisons que passer

se fondre en soi
se fondre en cercle
se fondre dans le reste
être l'espace
embrasser le tout
être total
(...)
être en transit être en pause être à l'arrêt
être le passé être l'avenir être le présent

Après s'être situé, dans la première partie du livre, juste avant le big bang, on assiste ensuite à une explosion du monde, et les poèmes sont le reflet d'une harmonie en devenir (ma peau creuse l'ombre), d'un être encore en formation, entre le zéro et l'Un, qui par exemple se fraye un chemin parmi les insectes et la maladresse des gestes encore non maîtrisés
Le livre se termine en revenant au corps, au "centre de la poitrine",  qui toutefois restera à la merci des éléments.
Recueil d'expérimentation poétique, la mise en page des poèmes et leurs dispositions très variées produisent un effet visuel qui est peut être un écho à la conception plurielle et mystérieuse de nous-mêmes et de ce qui nous entoure.

SUMBALLEIN, de Adeline Miermont Giustinati, Ed. Tarmac, septembre 2018




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