samedi 1 septembre 2018

PRISMES ET MOUVEMENT - NOTES DE LECTURE XII: VINCENT CALVET, "Visages de l'Autre", Ed. Sémaphore


Il s'agit d'un recueil où, d'emblée, on est pris par le mouvement, par le va-et-vient des pensées -balancement entre l'espoir ou la nuit- qui se dessine autour des éléments naturels et de la mer en particulier. L'auteur semble en effet en symbiose avec les marées pour mener une réflexion sur la valeur des mots pour représenter le monde.

Quelques motifs reviennent dans le ressac: la lumière, la présence de la mère comme un soulagement, les questions sur l'existence et sur notre place dans l'univers: nous y puisons notre énergie, mais est-ce suffisant?

A la recherche de sens, on dialogue. Est-ce avec la mer? Avec "un autre"? Ce qui est clair, c'est que nous devons nous éloigner du monde artificiel créé par l'être humain, qui s'oppose au lyrisme que renferme l'océan en nous faisant oublier la puissance du langage poétique qui doit nous conduire vers l'essentiel de l'être.

Loin de tomber dans le pessimisme, on dépeint un monde que nous devons nous efforcer de découvrir, car dans ses mille visages se cache non seulement une source de questions mais aussi l'inspiration et l'émerveillement nécessaire qui peut nous amener vers nous mêmes.

Cette quête est donc insérée dans un perpetuum mobile, dans le rythme de la construction poétique du livre comme dans les idées qui reviennent de façon presque obsédante: une agitation qui va de l'intérieur de nous-mêmes vers les réponses que peuvent apporter la mer/mère

"l'Horizon de la mer qui est un ventre de femme"

et, finalement, l"autre".


Car les réponses ne viendront pas seulement de ce qui nous entoure, mais surtout de cet "autre" qui est pour moi tout d'abord un dédoublement de nous-mêmes, de notre côté lumineux que nous devons mettre en avant en transperçant le doute et la douleur des questions, avec le "canif d'argent" de la poésie. Mais ces multiples visages sont, pour être plus justes, plus qu'une simple dualité noirceur-transparence: il y a en nous la complexité d'un prisme par lequel la réalité doit se transformer.
De même, cet "autre" peut être le "camarade" qui clôt le recueil, devenant ainsi une offrande pour quelqu'un qui aura la foi en la poésie pour la diffuser "le plus loin possible". 

Un livre qui résonne comme les vagues contre la côte, et dont la musicalité est à mi-chemin entre la litanie et l'incantation: on est captivé par les sonorités d'une cérémonie hallucinatoire hors du temps qui doit aboutir à la rencontre de soi et de l'autre. Et comme dans la partition de "La cathédrale engloutie" de Débussy, on navigue dans une "brume doucement sonore" pour aller "dans une expression allant grandissant" vers la lumière.

"Je te fais don de cette langue litanique  
  je te fais une offrande minimale  
 je sais que tu en feras bon usage"


Vincent Calvet, Visages de l'Autre", Ed. Sémaphore, 2018

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